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Guerre en Ukraine : Les constructeurs se retirent de la Russie

Sécurité des collaborateurs, difficultés d’approvisionnement ou décision éthique de fermeture. Au seizième jour de l’invasion de l’Ukraine, un grand nombre d’industriels ont déjà pris des mesures, isolant de plus en plus la Russie de l’économie mondiale. Voyons quelles sont celles prises par les poids lourds de la machine agricole.

John Deere

D’abord, Deere & Company a déclaré avoir interrompu les expéditions de machines vers la Russie il y a deux semaines, puis a arrêté ses livraisons vers la Biélorussie, pays vassal et supplétif de Moscou dans le conflit. « Nous continuons à surveiller la situation de près tout en respectant pleinement les sanctions américaines et internationales » a déclaré Jen Hartmann, une porte-parole du groupe américain. L’Ukraine et la Russie représentent environ 3% des ventes annuelles du groupe américain, qui dispose en outre d’un site de fabrication d’équipements de semis et de travail du sol, et d’assemblage de tracteurs 8R et moissonneuses batteuses à secoueurs à Orenbourg, en Russie, et un dépôt de pièces à Domodedovo.

Notons que l’entreprise dispose d’un bureau dédié aux activités agricoles et de matériel d’espaces verts en Ukraine, aux portes de Kiev, qu’elle a fermé afin de préserver la sécurité de ses salariés.  

CNH Industrial

Le groupe CNH s’est également engagé à suivre toutes les sanctions imposées et suit de près toute nouvelle mesure dès son entrée en vigueur. Dans l’intervalle, le groupe indique qu’il suspend à son tour les expéditions vers la Russie pour tous les produits et pièces, y compris les composants et les sous-ensembles. CNH Industrial affirme qu’il reste déterminé à soutenir tous les agriculteurs et les professionnels de la construction et soutient ses 207 employés russes, au sein de sa filiale de Khimki et de son usine d’assemblage à Naberezhnye Chelny et de ses 28 concessionnaires et 140 bases. « En tant qu’entreprise, nous faisons bien une distinction claire entre nos employés et leurs gouvernements respectifs, » indique le groupe américain. 

En Ukraine, la société emploie également 38 employés au bureau commercial de CNH Industrial à Kiev et compte 10 distributeurs dans tout le pays. 

AGCO

Alors que la Russie et l’Ukraine cumulés ne représentaient que 2 % des ventes d’AGCO en 2021, le groupe américain affirme que l’Ukraine et la Russie représentent ensemble une part importante des exportations mondiales de blé et de maïs et qu’il est essentiel de préserver l’agriculture pour s’assurer que cette crise humanitaire ne se transforme pas également en une crise de la faim. Pour soutenir cela, AGCO a également évalué et atténué les impacts énergétiques potentiels sur ses installations européennes. En Russie, le groupe n’a que des activités administratives et d’assemblage de matériels près de Moscou, avec une joint venture établie avec Russian Machines. 

A proximité immédiate, la Finlande partage plus de 1.300 kilomètres de frontière avec la Russie. Valtra y produit la quasi-totalité de ses tracteurs destinés à l’Europe et a stoppé dès le début du conflit les expéditions en Ukraine, en Biélorussie et en Russie. 

AGCO compte 50 employés basés en Ukraine et affirme que sa première priorité est la sécurité et la protection de ses employés et de leurs familles, ainsi que de ses concessionnaires et agriculteurs qui travaillent toujours pour sécuriser l’approvisionnement alimentaire mondial.

Claas

Le constructeur allemand a annoncé la semaine dernière qu’il souffrait d’une « chaîne d’approvisionnement fragile » – des pièces et des composants manquaient et a dû arrêter la production de moissonneuses-batteuses dans sa propre usine russe à Krasnodar.  L’usine mise en service en 2005, récemment agrandie assurait jusqu’alors la construction des moissonneuses-batteuses Tucano pour le marché de l’Est, le montage des gros tracteurs Axion et Xerion destinés aux marchés russe et kazakh. Plus de 1.000 Tucano sortent chaque année de l’usine, où elles sont entièrement fabriquées, de la pièce brute en acier à la machine prête à livrer, en passant par la carrosserie et la peinture. 

Au Mans, dans la Sarthe, c’est près de 350 tracteurs qui sont expédiés en Ukraine et autant en Russie chaque année, ce qui représente de 17 à 20% de son chiffre d’affaires. Déjà impactée par les pénuries de composants, l’usine de tracteurs Claas n’a depuis octobre 2021, honoré que 25 à 30 % des commandes de clients russes et ukrainiens. Et parce que les machines destinées au marché de l’Europe de l’Est ne sont pas conformes avec les dernières normes antipollution en vigueur dans l’Ouest du continent européen, les chances d’être ré-attribuées à un agriculteur ou un entrepreneur en Europe de l’Ouest sont très minces.

Same Deutz Fahr

Jusqu’alors sa seule liaison avec la Russie, le bureau de distribution « Same Deutz-Fahr Russia LLC » situé près de Moscou a été fermé en début de crise. Il est nécessaire de rappeler qu’en 2009, le groupe SDF avait tenté de s’établir en Russie, avec une usine de montage de tracteurs de 150 à 300 chevaux et de moissonneuses batteuses, pour contourner des taxations lourdes pour les produits d’importation. Un projet lourd, de près de 20 millions d’euros classé sans suite. De même pour le partenariat quatre ans plus tard avec le constructeur de tracteurs articulés Kirovets, à Saint Petersbourg. L’équité de l’échange ne pouvant être assurée durablement. 

Mais encore… 

Bien d’autres entreprises mondiales de machines agricoles ont mis fin à leurs activités en Russie, condamnant le pays pour son invasion de l’Ukraine. Nous ne les avons pas toutes listées, car elles sont nombreuses à opérer dans en Russie et en Ukraine. « Un constructeur agricole majeur ne peut ignorer ces zones » nous avait confié Thierry Krier, président du groupe Kuhn lors d’une conférence de presse le 23 février, sans pouvoir imaginer ce qui allait se passer le lendemain. « Peu de zones dans le monde ont un potentiel agronomique aussi fort que celui de la Russie et l’Ukraine« . Kuhn a en octobre dernier inauguré son nouveau site de Voronej dans le sud de la Russie, non loin de l’Ukraine. Fruit d’un investissement de 10 millions, le nouveau site occupe 12.500 m² couverts, pour la production d’outils spécifiques au marché de l’Europe de l’Est. 

Caterpillar possède une usine à Tonso, en Russie, qui fabrique des camions miniers et des excavatrices, ainsi que des composants expédiés vers des usines européennes. L’entreprise américaine a déclaré avoir suspendu ses activités dans le pays. 

Représenté par une dizaine de distributeurs en Russie, Lely y a cessé ses activités commerciales ainsi qu’en Biélorussie. « En tant que fournisseur mondial de robots de traite pour fermes laitières, nous sommes conscients de notre rôle dans l’approvisionnement alimentaire mondial, notamment en Ukraine, en Russie et en Biélorussie. » commente le néerlandais, qui ne livrera plus de robots neufs jusqu’à nouvel ordre. « Nous voulons faire droit aux intérêts de la population (approvisionnement alimentaire), des vaches (bien-être animal) et des promesses que nous avons faites à nos agriculteurs, entre autres. » Ce qui signifie que Lely continue de livrer uniquement des pièces de rechange et consommables, sans garantir de délais.

Pour Amazone, les conséquences du conflit en cours en Ukraine peuvent difficilement être évaluées pour le moment. L’entreprise dispose depuis 1998 d’une usine à Samara, le long de la Volga, nommée GAG Eurotechnika. Si elle fabrique et peint un certain nombre de pièces, l’usine assemble aussi des composants importés d’Europe de l’Est, notamment pour les distributeurs d’engrais et semoirs de semis direct. « Indépendamment de l’intérêt commercial, nous suivons l’actualité avec une grande inquiétude. Nos pensées vont aux gens, à nos employés et à nos partenaires dans les régions touchées. » On pense également aux entreprises telles que Lemken ou encore Horsch, qui dispose d’un site d’assemblage en Russie et des entreprises françaises telles que Gregoire Besson, Agrisem, Carré et bien d’autres, qui expédient chaque année un certain nombre de matériels sur ces marchés. 

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